Il y a deux façons de vivre sa vie : faire comme si rien n’était un miracle ou faire comme si tout était un miracle. A.Einstein
Il y a des matins où je me réveille avec le soleil. Il y a des matins où j’observe un rayon se frayer un chemin entre les plis du rideau. Il y a des matins où je regarde les poussières danser à travers les barreaux de mon lit. Dans la lumière, ces drôles d’étoiles en mouvement ne semblent pas vouloir se poser. C’est beau. Je n’arrive pas encore à les saisir. J’y arriverai quand je serai grand. Mes peluches dorment encore et les moutons suspendus au-dessus de mon lit sont toujours là.
Sont-ils restés toute la nuit ?
J’entends résonner dans la pièce d’à côté. C’est la grosse voix de papa. Je souris. J’aime bien sa voix. Elle a une odeur qui me rassure. Elle sait toutes les histoires des livres et connaît même le prénom de toutes les choses qui m’entourent. Des sons sortent de ma bouche, mais je ne sais pas pourquoi... Il y a des ombres sur le plafond. Je les regarde un long moment. Elles ne bougent pas. Les ombres ce n’est donc pas pareil que les nuages.
La porte claque. Je sursaute. Mes peluches sont réveillées. Ma gigoteuse limite mes mouvements, mais cela ne me gêne pas. A tâtons je trouve mon lapin bleu, celui qui était à mon grand frère. On me le pose toujours près des mains. Accroché au barreau, il fait de la musique le soir pour réconforter papa.
Quand le soir il rentre et me porte contre lui, j’ai toute une vie à lui raconter. C’est incroyable toutes ces choses qui se passent autour de nous. Alors dans la pénombre de ma chambre, lorsqu’il va me coucher, je m’applique, je vibre, je crie, je hurle. Les émotions sortent ainsi, je n’y peux rien je n’ai pas encore les mots. Lui aussi me parle de sa journée, il fait toutes sortes de sons. Les mots sortent ainsi de sa bouche. Il n’y peut rien, il n’a pas encore les émotions. Ce n’est pas facile à comprendre pour moi. Papa ne me regarde pas. Alors je lui montre que je suis là, je remue, je crie, je deviens rouge. J’aimerai lui dire : « Papa, tu as l’air fatigué, retrouvons-nous un instant.». Il se pince les lèvres, une larme coule sur sa joue, il me serre dans ses bras. Il ne parle plus et s’assied par terre. La musique de mon lapin s’est arrêtée. Moi aussi je me suis arrêté. J’ écoute les vibrations de son souffle. Je sens que ça cogne fort contre mon épaule. Ses bras m’enveloppent. Il tremble un peu. Je ne sais pas ce que c’est la journée d’un papa. On s’observe. Ses yeux, sa respiration, ses mains. Tout à coup, je comprends tout ce que son corps me dit. Alors je me blottis. J’ai tout mon temps pour toi papa. Je vais m’endormir sur toi. Tu peux me garder contre toi aussi longtemps que tu en as besoin. Je t’aime.
Demain, je me réveillerai peut-être avec le soleil, les oiseaux suspendus et les ombres au plafond. Demain, la porte ne claquera peut-être pas. Demain nous serons peut-être allongés, ensemble, essayant d’attraper les étoiles qui dansent. Ça arrive parfois dans la vie des papas.
Monsieur Chou
Le Billet des papas est une initiative de la Maison de la famille de la ville de Reims.
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