LE BILLET DES PAPAS

« LES PÈRES DE FAMILLE, CES GRANDS AVENTURIERS DU MONDE MODERNE. » Charles Péguy

 

A lui qui bosse et qui passe sa vie dans sa voiture, dans des hôtels, dans des restos, partout sauf chez lui. Lui qui roule et qui roule et qui dit à tout le monde qu’il pense à eux. Mais finalement ne voyant jamais ses gosses, il ne sait même plus à quoi ils ressemblent.

 

A lui qui fait la vaisselle, dans un appart trop petit pour lui, qui vit seul et qui n’entendra plus jamais crier son enfant. Non pas qu’il soit con ou qu’il ait raté quelque chose, mais il y a des drames qui explosent des familles. Même celles qui pensaient être unies.

 

A lui qui ne décroche pas de son écran, dans son canap’, dans l’ascenseur, dans la rue, au parc. Son fils pourrait se barrer avec un autre type qu’il ne le verrait même pas. Sauf s’il lui arrive un truc moche, un truc que C8 mettrait sur déroulant et qui secouerait son smartphone par des notifs’.

 

A lui qui donne des conseils parce qu’il a le temps de lire des bouquins, avec ses gamins parfaits, sa femme parfaite, son nombril parfait, son chien parfait. Lui qui n’a jamais connu de galères, mais qui a des idées sur tout et qui a surtout décidé de tartiner tout le monde de sa puanteur parfaite.

 

A lui à qui on ne dit pas qu’on ne veut pas lui confier de gamin, parce qu’il ne veut pas d’une femme pour remplacer son mec. Lui qui fait tout ce qu’il peut. Et même si la loi lui tend les bras, et que les cases sont cochées dix fois, on lui dira peut-être « oui » seulement pour les stats, pour les quotas, pour faire bien.

 

A lui qui découvre qu’il est papa d’un enfant déjà âgé de 1095 jours. Lui qui l’apprend de la bouche d’une femme dont il reconnaît le parfum, mais pas le visage. Car il y a trois ans il faisait nuit, le genre de nuit qui porte l’odeur de la vodka, de l’amour de substitution, qui vide la tête et qui finit par un kebab.

 

A lui qui voudrait mais qui ne peut pas en avoir. Qui aimerait savoir pourquoi, comment et avec qui se résoudre à cette idée. Lui qui se sent compris mais incomplet et qui finira par faire grandir le gamin d’un autre. Lui qui comprendra avec le temps que la paternité est un sujet plus important que de savoir qui a couché avec qui.

 

A lui qui dort dans sa voiture du vendredi au dimanche parce qu’il le faut bien. Parce que deux weekends par mois c’est tout ce qui lui reste. Parce qu’elle s’est barrée, qu’il est en tort, que ses mômes lui tirent la gueule et que Lyon s’est loin. Parce que pour pardonner, il faut accepter. Pour accepter il faut comprendre. Et pour comprendre il faut du temps. Et du temps, il n’en a pas.

 

A ceux dont les valeurs se sont abîmées par des décisions difficiles. A ceux qui ont pris la main des passions tristes. A ceux qui n’ont pas vu d’étoiles dans le chaos. A ceux qu’on ne comprend pas toujours. A ceux que l’on prend pour ce qu’ils sont : des êtres humains dignes d’être aimés.

 

A lui, à tous ces aventuriers des temps modernes et aux autres.

 

Monsieur Chou

Le Billet des papas est une initiative de la Maison de la famille de la ville de Reims. 

 

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