LE BILLET DES PAPAS

Mon cher David,

 

C'est le 10ème billet et déjà tu t'écris à toi-même. Il est évident que les gens passant par-là, trouveront que Monsieur Chou à s'être gorgé de trop de soleil durant le confinement est devenu Monsieur Melon !

 

Mais je ne pouvais pas faire autrement car il fallait que je te dise, à toi David de Juillet 2010, une chose bouleversante : Tu vas être papa.

 

Il y a quelques semaines, vous faisiez un jeu. Allongés sur un canapé rouge, l'un et l'autre évoquiez les « Pour » et les « Contre » afin de savoir si, rationnellement, avoir un enfant à votre âge, loin de vos familles, et sans argent de côté était une bonne idée. A ce moment de ta vie, l'intuition t’a murmuré : Allons-y, puisqu’il n'y a pas de bonne raison d'en avoir. Je te le confirme même si, aujourd'hui encore, cela m'apparaît bien mystérieux. A y réfléchir, ce choix nous appartient-il vraiment ?

Je sais que tu trouves que tout va très vite. Sous tes airs détachés milles questions te submergent. Il faut dire que tu n'as encore jamais côtoyé d'enfants. Tu n'as même jamais porté de bébé. Ton enfant sera ta première fois. Il y en aura tellement d’autres. De là où je suis, je voudrais t'encourager. Je voudrais être, pour toi, la main sur l'épaule que je n'ai pas eue. Je voudrais te dire que la parentalité : c’est l’éthique de l’incertitude, que c'est le bordel et que tu fais de ton mieux.

 

Je me souviens qu'à l'époque tu te disais qu'avoir un enfant cela ne changerait pas beaucoup ton quotidien. Et tu avais raison. Dans les mois qui suivront, les sorties, les temps libres, les apparences ne seront pas bousculées. C'est l'invisible qui changera :  à travers la nature de tes questions ; dans la résonnance des mots « responsabilité » ou « limites ». Ce seront aussi tes centres d'intérêts qui glisseront vers des domaines insoupçonnés. Si tu me voyais aujourd'hui, tu ne te reconnaîtrais pas ! J'ai toujours des cheveux rassures toi, mais tes amis sont partis. Tes mots ont changé. Le silence t’est devenu précieux. Tes émotions ne sont plus en cage. Et tu n'as plus envie de fuir, car où que tu sois une famille t'attend.

 

En parlant de fuir, tu nous en as fait voir de toutes les couleurs. Mais je ne t’empêcherai pas de t’abimer. Car sans tes excès, sans ta peur de ne pas être aimé et tes choix impulsifs, ce serait un autre qui t’écrirait aujourd'hui. Au fait, il faut que je te dise, après cette première Joie que tu vas vivre dans quelques mois, deux autres garçons viendront. Ne paniques pas, tu feras tes expériences et tu apprendras. J'ai remarqué au cours de ces années que nous, parents, avons une capacité à nous dépasser. Qu'importe le nombre d'enfants, on a toujours l'impression d'être au bout… Et puis, on s'adapte, et la perspective d'une nouvelle aventure ne semble plus insurmontable. Je t’assure. Il faut le vivre pour le croire.

 

Je t’écris d’un village dont tu ignores l'existence. Je t’écris d’une vie que tu vas bientôt connaître. Je t'écris avec des mots que tu portes déjà.

 

Monsieur Chou

Le Billet des papas est une initiative de la Maison de la famille de la ville de Reims. 

 

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